La rencontre et l’échange sont l’essence même des idées, entre le shaper Chipiron et Alain Bourdon ça donne : Tropical city.
Ce projet nous invite à retrouver une nature oubliée par le citadin à travers un objet de désir. Le dessin se veut être l’ouverture sur ce monde accessible mais délaissé. Un univers graphique noir et blanc où la simplicité de la nature impose son charme.
Lors de la présentation de cette collection chez Wait, nous avons pu rencontrer Alain Bourdon qui nous en a dit un peu plus sur ce projet.

Bon la première chose c’est de savoir qui tu es. Peux-tu nous expliquer en quelques mots ton métier, où tu vis en ce moment, la nature de tes projets, ta passion pour le surf bref on veut en savoir plus !
Je suis designer graphique indépendant à Paris la semaine. Le reste du temps, je suis sur la route en moto à la recherche de vagues ou de falaises à escalader. L’empathie avec la nature étant absente en ville, il m’est vital de retrouver un autre rapport au temps, aux gens… Le surf fait partie de ce processus d’éloignement mais qui procède aussi d’une volonté de me détacher des choses courantes. Dans l’eau, tu n’as rien, ne possède rien ni personne et le contrat avec la nature devient essentiel. Je crois qu’il est de bon ton de se rappeler cela ces jours. Cette politique me suit également dans mon travail où j’ai axé mes projets autour d’une éthique rigoureuse où l’argent rentre moins en compte que l’aspect culturel, social, amical ou émancipateur d’un travail.
Mes clients sont des institutions culturelles, des revues, des festivals… Tout ce qui permet une rencontre autour d’un beau sujet.
Toi sur Paris, Chipiron à Hossegor, comment a pu naître une telle collection ? Quel est le point de départ de ce projet? Est-ce ton premier projet lié au surf ?
Cette collection est née sur la plage des Culs Nus à Hossegor autour d’un burger après une session avec les planches Chipiron. Je connaissais Damien suite à un film réalisé avec le magazine lifestyle
TrendyMood et tout s’est monté entre le bacon et la salade. Nous parlions de l’attrait de la nouvelle mouvance de surfeurs qui cherchait sûrement dans l’eau la réflexion qu’il est impossible d’avoir dans une tour à travailler sur son PC. Peut-être que cette génération cherche à se retrouver (étymologiquement) dans l’eau où on ne peut se cacher, tricher ou changer l’élément.
Damien m’a laissé carte blanche et la collection s’est axée autour du dessin fait main et de cette ouverture vers un « ailleurs » qu’il induit, notamment pour un citadin. Au café, le projet était bouclé.
Pourquoi avez-vous voulu intégrer la nature au cœur de votre projet ? Par un souci de conscience ? C’est quelque chose d’important pour toi dans ta vie quotidienne. Dans la façon de voir le surf « Spirit »?
Une partie de ma famille vient du Lot où j’ai passé des mois dans la nature à chercher des dolmens et à bricoler. Des journées de liberté, d’écoute des sens et d’indépendance totale dans les causses loin de la mer. Une autre partie vient du Vietnam où j’ai composé avec le zen, l’équilibre, la mesure, l’attention pour les choses. Cette combinaison est de fait une de mes composantes que l’océan m’a permis d’extrapoler non pour une conscience, mais pas « viscéralité ». J’aime cette notion romantique de se sentir petit, à sa place dans un cosmos. Comme le tableau de
Caspar David Friedrich où une immensité est peinte sur un tout petit format.
La nature n’est ni bonne, ni mauvaise. Elle est. Comment composer avec elle dans un dialogue sans lui nuire et me nuire ? Être à cette écoute découle dans mon quotidien : travail, amitié, politique, cuisine, rapport à l’argent mais aussi à la consommation, au pouvoir, au design…
D’un point de vue technique voire même artistique car la contrainte inspire aussi, est-ce que de travailler sur un surf et sur des dérives a orienté ton travail dans ton processus de création .
Tu as raison oui. La contrainte est bonne pour moi mais je l’appelle « cahier des charges » (car je n’aime pas le pouvoir !). Elle permet de contracter et de s’apporter l’un / l’autre : je dois écouter pour rendre un projet qui s’adapte à un désir.
Le dessin devait composer surtout avec le blanc de la mousse, d’où un dessin exclusivement noir et blanc. Traduction également d’un idéal de pureté et « d’essentialisation ». Pas de superflus, de détails inutiles. Juste une invitation à rentrer dans cette masse noire pour s’y retrouver. La planche est un superbe vecteur de fantasme et travailler sur ce support avec Damien a été une belle expérience. Encore une fois : voir, toucher, sentir, écouter…
Où peut-on trouver cette collection en France ?
Elle tourne depuis sa sortie de ville en ville. Le projet était de proposer une invitation au citadin à sentir autre chose qu’un asphalte déshumanisé. Nous avons été à Barcelone, Paris, Hossegor… Mais elles se vendent et il ne restera bientôt plus que les stickers !
Quels sont tes futurs projets ? Tes envies du moment ?
Etre bien et droit dans mes bottes. Les projets découlent d’état de vie, de moments. Les curseurs s’adaptent en fonction de mes envies, rencontres ou lieux de vie. Poursuivre mon travail qui est lié à ma vie personnelle. Une envie tout de suite ? Être dans l’eau ou sur une falaise. Cela permet de penser les sujets importants loin des influences parfois polluantes.
En revanche ce que je sais, c’est qu’un beau projet va naitre à plus grande échelle avec Chipiron cet été pour la rentrée…
Merci Alain pour toutes ces réponses ! On a hâte de voir ce nouveau projet !



