Crédit image : Les chiffres d'Alfred : www.mercialfred.com
DECRYPTAGE
Quand le phénomène "anti-mode" est paradoxalement devenu à la mode, j’ai eu envie de m’y intéresser... Alors qu’est ce qu’un hipster ? Quel est le principe ? Quels sont ses codes ? Que revendique-t-il ? Est ce que l’on naît hipster ou peut-on le devenir ? J’ai mené ma petite enquête pour tenter de trouver des réponses...
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Premier réflexe, je vais voir sur wikipédia. Quand on y tape hipster, on apprend que le terme date des années 40. Il désignait les blancs qui aimait le jazz, le bebop, l’argot, les arts, les drogues, l’amour libre... mais sans être hippy qui eux, débarqueront plus tard avec encore un autre concept. Ne mélangeons pas tout. Déduction ? Jack Kerouac et sa clique étaient donc des sortes d'hipsters. C’est bon, je cerne globalement le principe.
Ensuite, on lit que le terme hipster est revenu dans les années 2000 pour caractériser des jeunes de catégories sociaux-professionnelles élevées, plutôt cultivés, habitants principalement dans les grandes villes. Je décide de pousser un peu mes recherches et j’apprends que le hipster de base, l’authentique des années 1940, cherchait à s’affranchir de sa couleur de peau en se rapprochant de ce qui faisait la culture des noirs américains de l’époque. Je résume ça à une recherche d’anti-conformisme. Le hipster est cool car il ne suit pas ce que la société lui impose.
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Alors comment le hipster d’aujourd’hui défend-t-il ce principe là ? Comment se démarque-t-il des autres ? J'ai l'impression que le hipster dit "moderne", se démarque plus culturellement que par son mode de vie. Contrairement à ses aînés, ils mènent une vie relativement banale et rangée loin de ce que pouvait décrire Kerouac dans ces romans. En effet, il apparaît comme un individu type "geek branché" (sans jeu de mot) et ce, grâce à son environnement social, son éducation, ses centre d'intérêts, ces études supérieures... Il évolue dans un monde cosy et tout semble être propice à cet état de fait. Il travaille ou du moins affectionne souvent le marketing ou la communication. Il en connaît un rayon sur ce qui est tendance sur le net : les sites, les blogs, les dernières applications... Du coup, il est cool car mine de rien, il entretient sa culture.
Puis, en me posant ces questions, j’ai compris que mon article devait prendre un virage pour aborder celui que je qualifierais de hipster "industriel". Répondant purement au principe du “c'est ceux qui en parlent le plus qui en font le moins”. Après tout, le vrai est tellement en marge qu'on n'en parle pas. Naturellement authentique, il ne fait pas de bruit. Voilà donc pourquoi dans mes observations et mes lectures, je ne voyais donc que le cliché ambulant notamment en terme de look. Le hipster mâle “industriel” est décrit comme portant un bonnet sur la tête et une barbe au menton, des lunettes à grosses montures, une chemise de bûcheron, un slim qui moule tout ce qu’il trouve, des chaussures étranges et ayant à la main un smartphone à pomme...
Ce sont eux qui font le buzz. Ceux qui revendiquent tout haut ce qui est “underground” et “no-mainstream” (comprendre “tout ce qu’il ne s’adresse pas au grand public”). Ceux qui ne mangent que des choses “healthy” voire “veggy” et qui font du vélo à pignon fixe ou du skate type bantam... En somme, ceux qui, comme les membres du Fight Club de Tyler Durden qui ne doivent jamais avouer leur appartenance, les hispters ne s'avoueront jamais aux autres qu’ils sont hipsters alors qu’ils se donnent tant de mal à l’être...
C’est typiquement ce profil là qui - à la mode - amuse les autres et à mon sens c’est pour cela qu’il est connu et reconnu. On parle de celui qui emploie des anglicismes ainsi il “check”, il a des “eyes contact” et j’en passe. Celui qui nous dit qu’il souhaite être unique, loin de ce qu’il juge commercial - toujours en avance sur ses congénères - et qui finalement attire la gentille moquerie. Les antis iront jusqu’à vous dire ironiquement que les hipsters écoutent des groupes de musique qui n’existent pas encore et que passionnés de photographies, ils utilisent exclusivement instagram.
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Alors comment le phénomène a-t-il perdu de sa crédibilité ? Je serai tentée de vous répondre : “justement à cause de tout cela”. Le fait est que le phénomène anti-mode a fini par en créer une. Le concept “no-mainstream” a perdu son “no”. Le hipster des années 40 qui revendiquait des fringues de manants, sans un sous en poche et vivant au jour le jour, a laissé place a une majorité de dandys modernes qui claquent leurs argents afin de capitaliser dans le paraître. Il reste plus facile d'adopter un style plutôt que d'appliquer les préceptes décousus et totalement marginaux de leurs pairs.
A la question du pourquoi, je dirai avant tout que c’est pour être branché tout en se donnant un air de pas y toucher. Peut être qu'ensuite, j’avancerai l’argument de la facilité. Soyons honnêtes, être geek c’est péjoratif et affirmer un mode de vie sans stabilité, sans argent et vivre de musique et poésie, c'est bon pour les rêveurs. Pour finir, c'est une revendication snobe car faire partie de ce mouvement, c'est un peu comme appartenir à une élite avec des connotations positives. autour d'un certain savoir, une certaine culture et d'un certain niveau de vie.
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En conclusion, je dirai que fort de son succès, le phénomène a pris de l’ampleur à grand coup de médias et d’internet au point de faire perdre l’essence même du mouvement. Une sorte de paradoxe du mouton qui malgré lui - ou pas - entre dans un vaste troupeau.
Les hipstos (oui,on peut dire les deux !), qu’ils soient authentiques ou plus industriels, sont avant tout des - jeunes - gens qui cherchent à se démarquer. Qui n'a jamais eu envie d'être absolument unique ? Que celui qui peut se vanter de n’appartenir à aucune tendance leur jette la pierre. Puis, vous savez, comme tout mouvement, à la fin, il ne restera que les vrais...
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